Quand Preval brule son premier ministre

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Quand Préval brule Alexis

En une semaine, le pays a connu d'importants événements qui alimenteront pendant longtemps la chronique et la plume de nos historiens.

Des Cayes aux Gonaives en passant par P-Au-P, Haiti s'est embrasée en fredonnant non pas cette fois « Nou bouke...ou encore fò'l ale...

», comme ce fut le cas ces dix dernières années ; mais plutôt Abas la vie chère. Une revendication sociale profondément idéologique.

Des mouvements de protestations des pauvres comme des éléments de la classe moyenne non sans casses qui n'ont pas eu le temps d'être récupérés par des idéologues de l'oligarchie.

Tout le monde a été pris de court...Le bilan est lourd.

On a peur de chiffrer car le syndrome de réparer les nantis au détriment des pauvres, des émeutiers de la faim laisse encore une plaie béante dans nos esprits.

Mais qui a causé ces événements?

Comment en est-on arrivé là?

Le président René Préval et son dauphin Jacques Edouard Alexis aujourd'hui premier ministre limogé par le sénat, les deux haitiens les plus expérimentés dans la gestion de la Rex Publica, avaient du temps pour prévenir et anticiper sur ces émeutes de la faim.

Car, si la production nationale comme ils le préconisent si bien en est le panacée, Haiti ne pouvant plus donner à manger à tous ses fils, agronomes de formation ces deux hommes d'Etat semblent oubliés les dégats causés par la déforestation de nos terres arides.

D'où l'infertilité d'une bonne partie du territoire.

La réaction du chef du gouvernement au début des émeutes dans la ville des Cayes le 3 Avril dernier avait surpris et énervé plus d'un. Jacques Edouard Alexis ne pouvait pas nier l'existence d'une situation de misère chronique dans toutes les régions du pays. Delà à parler ipso facto sans arriver à le prouver de manipulation par des trafiquants de drogue et les contrebandiers, c'était soulevé toute Haiti contre sa personne.

Aristide en paie encore aujourd'hui le tribut pour avoir été mal informé et aussi mal apprécié les soubressauts de 2002 à 2004.

Mr Alexis n'a pas puisé des énergies dans cette tranche d'histoire.

L'intervention tardive du chef de Etat quant à lui le mercredi 9 Avril n'avait rien de consistant ni l'empreinte d'une autorité supérieure pouvant tempérer ni tamponner des blessés après une guerre dans laquelle des soldats sont tombés pour la défense de la souveraineté nationale.

Car elle n'a apaisé ni la faim des manifestants ni la rage des casseurs encore moins reconforté les victimes.

Mais, avait plutôt démontré l'absence de tout programme de la part de son équipe et de politique publique visant à adresser les revendications populaires pour ainsi fragiliser et mettre à prix la tête de son ami premier ministre.

René Préval avait redit en de nouveaux termes ce que qu'on connaissait déjà à savoir que le président n'entend pas faire de miracle ou que le premier ministre « paka fè san sot nan roch ».

Alors que l'on parle de chlorox, de faim qui tenaille et trépasse en même temps...

Malgré tout, le président de la République n'avait jamais été visé par les manifestations de rue. Il a été surtout question ou du moins timidement de renvoi du chef du gouvernement ou de replâtrage du cabinet ministériel.

Ce que, René Préval avait toujours refusé a concédé Jacques Edouard Alexis en pleine séance d'interpellation au sénat samedi dernier.

Avec un président qui affiche une telle nonchalance, fallait-il laisser pourrir la situation ou attendre une nouvelle semaine de mouvements avec des dégâts encore plus lourds: agressions systématiques des médias et des journalistes, mis à sac des magasins, pillage d'entreprises privées, incendie d'institutions publiques?

Ou encore écouter d'autres discours du genre « nou paka fè miral, anntann lè rekolt la bon »?

Non, trois fois non ! Quelque chose devait changer même substantiellement en infligeant une sanction politique à une tête qui s'est mal recroquévillée. D'où la décision du groupe des seize au sénat de la République.

Confortés par le vide laissé dans le discours du président de la République et aidés par le président du grand corps malgré lui, ces pairs conscrits ont sommé l'occupant de la Villa d'accueil de partir ou de les affronter dans une séance d'interpellation.

Une tentative qui n'a pas dégonflé Jacques Edouard Alexis, tigre en lui seul qui a attendu la formalisation par cette nouvelle majorité du sénat de la procédure d'interpellation comme le veut la loi mère dans ses articles 129 et alinéa.

Au moment où le samedi 12 Avril ce Gonaïvien né emmenait son équipe au bûcher tenu jalousement par Youri Latortue un autre co-régionaire, le chef de l'Etat lâche du lest au palais national.

On n'attendait que ça depuis une semaine avant les casses et la sommation de démission.

Et, au bicentenaire le sort de Jacques Edouard Alexis était connu à moins d'une trahison ou d'un revirement spectaculaire comme c'est monnaie courante chez nous au prix de ce que la rumeur nous a déjà enseigné dans des occasions similaires et même très récentes...

Pourquoi le président de la République a attendu tout ce temps pour annoncer des mesures de redressement, synonymes de miracle aujourd'hui et de sacrifices pour ces importateurs de riz?

Pourquoi a-t-il lâché Jacques Edouard Alexis un ami fidèle et dévoué serviteur, à un moment où celui-ci avait grand besoin de lui?

Pourquoi René Préval n'avait pas jugé opportun de remanier le cabinet ministériel malgré son manque de résultat et la grogne sociale, au lieu de faire perdurer la crise jusqu'au limogeage de toute l'équipe gouvernementale?

Pourquoi le premier ministre lui-même en dépit de son entêtement et de son incrédulité n'avait pas choisi de démissionner devant le sénat après avoir constaté la présence dans l'hémicycle de dix sept parlementaires dont les seize interpellateurs avant même le vote fatidique de cette majorité conjoncturelle?

Peut-être parce qu'il avait jusque là la confiance de la présidence oubliant que chez nous la Révolution peut manger à tout moment ses propres fils.

Un ancien premier ministre, Jean Marie Chérestal avait dans une situation similaire tiré ses épingles du jeu en démissionnant au lieu d'affronter une majorité sénatoriale qui lui garantissant déjà une motion de censure.

Il était devenu candidat à la présidence en créant le PONT, une petite formation politique qui compte deux sénateurs (Evalière Beauplan et Rudolph Joasil).

Jacques Edouard Alexis s'est montré trop attaché à son poste pour une fois encore n'avoir pas tiré les leçons politiques de l'histoire récente d'Haïti.

Dans les élites, les premiers ministrables ont déjà enfilé leurs culottes et ajusté leurs crampons ; les séances de tractations politiques commencent.

Les tombeurs d'Alexis se disent favorables à la reconduction de ministres ayant amplement accompli leur mission.

Autant dire que l'ancien recteur de l'Université Quisqueya demeure la grande victime de la conjoncture.

Enfin, au moment de l'interpellation au Sénat de la République les partisans de Jacques Edouard Alexis, particulièrement des membres d'organisations populaires et de femme, qui menaçaient de casser, de brûler le 28 février dernier lors de la séance à la chambre des députés ont brillé par leur absence.

Ont-ils tous déjà été tenaillés par la faim communément chlorox?

Membre fondateur de la plateforme politique Lespwa ainsi que Kély Bastien qui a dirigé cette séance historique de la chambre haute, le 12 avril 2008 Jacques Edouard Alexis a été écorché en présence de Fréderica, sa femme, la seule personne qui lui soit encore fidèle.

Eddy-Jackson ALEXIS
alexis2ajh at yahoo.fr

Delmas 13 Avril 2008

Eddy-jackson Alexis, May 1 2008, 7:33 PM

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